Auguste-Gausserand


Robert Auguste (1922-1991) 
 Gyn Gausserand (1932–2018)


Céramistes français.
Un atelier commun, un travail à quatre mains puis à deux.
Ancrée dans le style des années 50, l'œuvre de Robert Auguste et Gyn Gausserand témoigne d'un atelier collaboratif où avec le temps chacun s'est exprimé différemment, l'un privilégiant la forme et l'autre le décor.
Robert Auguste

Rencontre à l’école de Fontcarrade, au ‘cœur‘ de la Terre (1948-1949)
Né en 1922 à Montpellier, Robert Auguste a étudié la philosophie. Après sa mobilisation pendant la seconde guerre mondiale, passionné de cinéma et photographies, Robert s’est pourtant tourné vers la poterie en s'initiant au tournage à l’école de Fontcarrade sous l’enseignement d’Emilie Décanis. Il est alors âgé de 27 ans. 
Née en 1932 à Montpellier, Ginette Gausserand dit Gyn suit des études aux Beaux -arts. A l’âge de seize ans, toujours à Montpellier, elle se forme à la poterie à de l’école de Fontcarrade. 

Lors de son apprentissage en 1948-49, elle rencontre Isabelle Ferlay (qui créera avec Frédérique Bourguet, l’atelier Les Argonautes à Vallauris, selon les sources c'est Frédérique Bourguet que Gyn a rencontré plutôt qu'Isabelle) et Robert Auguste son ainé de dix ans, déjà marié avec deux enfants. 
L’amitié prend forme d’amour entre Robert et Gyn. Aussi, la jeune femme demande et obtient son émancipation en 1948 pour pouvoir suivre le jeune homme (à cet époque, la majorité était fixée à 21 ans contre 18 ans de nos jours). 
robert auguste rga gyn gausserand
Durant 1949, Gyn travaille dans une manufacture à Annecy. 
Entre 1950 et 1951, le couple tente l’expérience à Paris. Mais en 1952, c’est l’appel de Vallauris, la ville aux 100 potiers, tant médiatisée par la présence Picasso, devenu potier chez Madoura.

Vallauris, lieu des créations artistiques et du folklore (1952-1960).
De 1952 à 1960, Robert Auguste et Gyn Gausserand travaillent la terre à Vallauris. 

Ensemble, ils ouvrent leur propre atelier et travaillent à quatre mains. Habile tourneur, le jeune homme monte les formes (zoomorphes et anthropomorphes) dessinées par Gyn et émaille les décors imaginées de sa compagne. La production alterne les genres en passant du figuratif (animal ou végétal) à l’abstraction géométrique inspirée du langage visuel de Joan Miro et Paul Klee.
En parallèle, par esprit de communautarisme mais aussi par soucis financier, chacun travaille pour d’autres ateliers artistiques : Robert tourne à la poterie du Grand Chêne avec Odette Gourju et Ljuba Naumovwitch, où il forme au tour le jeune Michel Anasse en 1953. Il tourne aussi pour Gilbert Portanier. Quant à Gyn, elle est décoratrice chez Jacques Lignier
L’aventure Vallauris permet de rencontrer les meilleurs céramistes d’après-guerre dans une ambiance joyeuse et festive. C’est aussi l’occasion de fonder une famille avec la naissance de Joël en 1952 et de Claire en 1954. 
De 1954 à 1959, le couple participe aux expositions de Nérolium. 

Pour leur atelier, le couple Auguste produit une céramique utilitaire et décorative, orientée art de la table, ce qui laisse peu de temps pour des créations plus personnelles. Le style floral, au décor quadrillé blanc et bleu ou vert est dans l’esprit de la production culinaire commercialisée par Robert Picault
Surfant sur les vagues de peintres surréalistes, l’abstraction, composée de décors géométriques stratifiés inspirent Gyn et les céramistes Jean Rivier et Peter Orlando.
Durant la période Vallauris, les travaux communs du couple sont co-signés ‘RGA’ ou ‘R.G.A’ ou ‘R et G Auguste’ avec parfois la mention Vallauris et la date. La signature est  incisée, à l’émail, parfois au feutre après cuisson.
Pour les travaux personnels, l’initiale mentionne le créateur R pour Robert (‘R Auguste’ ‘R.Auguste’, RA) et G pour Gyn (‘G Auguste’, ‘G.Auguste’, ‘GA’ principalement pour les panneaux céramique).
Militant engagé, Robert Auguste adhère à la chambre syndicale des céramistes de France (Paris) en 1960 (dont l'un des objectifs est d'informer sur les évolutions administratives et juridiques de la profession).
Son adhésion est parrainée par Roger Capron et Georges Cueille. Cette même année, celle de Georges Jouve sera parrainée par Pol Chambost et Marcel Guillot, et celle de Norbert Pierlot par Mado Jolain et Fernand Lacaf

Si l’adhésion au syndicat est aussi un moyen d’exposer au salon professionnel des Ateliers d’Art (Paris), afin de diffuser la production auprès des boutiques de cadeau, il ne semble pas que le couple Auguste ait utilisé ce circuit de commercialisation pour faire connaitre et vendre leur production. Ils sont restés désireux de vendre localement leurs pièces. 
Mais la concurrence vallaurienne est dure. Lassés par l’abondances des poteries ‘folklores’ fleurissantes dans Vallauris, Robert et Gyn décident de fermer l’atelier fin mars 1960 (date de la fermeture administrative).

Un nouveau souffle d’air en Occitanie (1960-1965)
La famille Auguste quitte Vallauris pour tenter l’expérience à Millau (Aveyron) en rejoignant une poterie en activité. Situé au cœur de la ville, place des martyrs de la résistance, le nouvel atelier boutique connait le succès durant cinq ans. Mais en 1965, la démolition du quartier oblige le couple Auguste à quitter la région pour s’installer à Pouzilhac. Pendant cette période, Gyn a sculpté une grande vierge à l’enfant pour l’école du Sacré Cœur de la ville.
Les pièces sont parfois signées Millau, Potiers des gorges du Tarn, RA GG.

Pouzilhac, l’atelier-boutique (1965-2017)
Dans le Gard, le village rural de Pouzilhac est situé sur l’axe routier menant aux stations balnéaires de la Grand Motte, Palavas les Flots … et à l’Espagne. Un lieu stratégique pour se rendre en vacances dans le Sud de la France.
Attenante à la maison, l’atelier-boutique de 200m2 est face à la station-service qui permet ainsi aux touristes en transit de se dégourdir les jambes en visitant la poterie. Le succès est en rendez-vous. 

Les commandes proviennent des visiteurs de passage dans la boutique et les acteurs régionaux. Mais cette commercialisation locale nécessite une présence permanente, et le couple travaille sans relâche, sans prendre de temps pour eux. 
En 1973, Gyn, lassée par cette vie de dure labeur, part quelques temps à Vallauris. Employée dans l’usine de Roger Picault, l’ambiance de l’atelier, bien trop grand pour elle, ne correspond pas à sa conception du métier. 
De retour à Pouzilhac, le besoin d’indépendance et de liberté artistique de Gyn scinde le couple mais pas le lieu de travail. Si le divorce est prononcé 1974, Robert et Gyn continuent de partager ensemble le même atelier boutique, développant chacun leur propre style et production, revisitant les formes et les décors. Tournée et émaillée, les pièces de Gyn sont signées GYN ou GG. 
La petite série artisanale est privilégiée. 
Au fil du temps, le travail évolue répondant aux besoins et aux modes de l’époque. Les décors floraux et animaliers s’estompent, les plaques murales se gorgent d’abstraction géométrique et de figurines féminines. Les pièces tournées de Robert sont imposantes en taille. Et Gyn revisite les dessins esquissés des années 60 adaptant le décor pour les années 2000. 
Les deux enfants du couple tiendront à leur tour momentanément à Pouzihac un autre atelier de poterie avec leur conjoint respectif Jean-François Reboul et Marie-Paule Allégier, formés tous deux chez Robert Auguste.


Robert travaille jusqu’à son décès en 1991, et Gyn continue seule à l’atelier qui ferme ses portes en 2017.
Pour en savoir plus, lire la monographie du couple par Mme Graziella Semerciyan. 

Texte  © Christine Lavenu ( publié le 03/03/2024)

Sources, pour voir et en savoir plus : 
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